Lorsque j’ai entrepris de me préparer pour mon premier marathon en 2006 (j’avais arrêté mon choix sur celui de Toronto), j’ai utilisé un plan d’entraînement beaucoup trop exigeant pour moi. Je possède un ordinateur Polar et sur leur site internet, j’avais obtenu un programme «personnalisé» en quelques clics… Maintenant que j’ai un peu plus d’expérience en endurance (3 marathons et 2 demi-ironman), je réalise que ce n’était pas du tout un programme pour débutant.
Personne ne m’avait jamais expliqué ce que c’était que de l’endurance fondamentale, du tempo, des intervalles… Durant mes entraînements, j’avais deux vitesses : ma vitesse de départ et celle de mon arrivée… beaucoup, beaucoup plus lente. Je frappais le mur à chacun de mes entraînements car je les entamais comme si j’allais courir un 10 kilomètres. Je courais donc trop rapidement à chaque fois. Et je ne comprenais pas pourquoi c’était si souffrant de s’entraîner. Et comme c’était souffrant, je me disais parfois que mieux valait courir à un bon rythme pour que ça dure moins longtemps! Je me tirais dans le pied à chaque fois.
Mon premier 28 km avait été très pénible. Lorsque j’ai entrepris mon 32 km, ce fut bien pire. C’était un vendredi. J’avais congé. Mon itinéraire partait de ma résidence située à St-Basile-le-Grand et m’amenait 24 km plus loin sur l’île Notre-Dame. De là, je complétais les kilomètres manquants avant de terminer mon trajet à Radio-Canada ou m’attendait mon conjoint.
Ce fut atroce. Extrêmement pénible. Je me sentais comme une condamnée. J’avais une sentence à purgée. Et malheureusement, j’avais mal calculé mon itinéraire. Lorsque mon ordinateur de course a finalement affiché le chiffre magique m’indiquant que mon enfer était terminé, 3 autres kilomètres me séparaient encore de mon conjoint. Absolument incapable psychologiquement de continuer, complètement exténuée, je décide alors de me chercher un taxi. Pas évident de m’en trouver un… je n’ai pas de cellulaire et il n’y a pas de téléphone public dans les environs. J’entreprends alors de marcher péniblement vers le métro. Comble de malheur, je n’ai aucune idée de l’endroit ou se trouve ce foutu métro. Je croise alors un homme à qui je demande mon chemin. Sa réponse lorsqu’il constate mon état : « Madame, voulez-vous que j’appelle une ambulance »!
Selon mon programme d’entraînement, je devais théoriquement courir 36 km le week-end d’ensuite. J’étais complètement découragée. Je ne me voyais absolument pas répéter cette pénible expérience. Pour m’aider à traverser cette épreuve, j’ai alors songé à une solution : m’inscrire au marathon de Montréal qui avait justement lieu ce week-end-là. Je pourrais retirer plusieurs avantages de l’événement. Tout d’abord, j'aurais droit à l’ambiance de la foule et à la compagnie d’autres coureurs, très précieux comme motivation. Je n’aurais pas à trimballer de l’eau pour m’hydrater, le parcours serait bien balisé et s’il m’arrivait un pépin, il y aurait des secours. Il faudrait par contre que je me retire au 36e km…
Je contacte par téléphone le coach du club de triathlon dont je suis membre pour lui demander conseil. Après notre conversation, je raccroche le téléphone complètement démolie. « Tu n’as pas la maturité physique et psychologique pour courir un marathon », me dit-il alors que je m’entraîne depuis des mois.
Cette phrase restera ancrée en moi très profondément et me fera réfléchir énormément. Après avoir analysé froidement ma façon de m’entraîner, je décide finalement de m’inscrire au marathon de Montréal et de courir, cette fois, à une vitesse constante, une vitesse très confortable, que je pense pouvoir maintenir jusqu’à la fin. Mon objectif, maintenir un pace de 6 minutes du kilomètre.
Le matin du marathon, je suis extrêmement nerveuse. Heureusement, je sais que mon conjoint et des amis se trouvent le long du parcours pour m’encourager. Dès le coup de départ, je surveille attentivement ma vitesse pour m’assurer que je ne coure pas trop vite. Durant le premier kilomètre, mon patron – que je ne savais pas marathonien - me dépasse. On se salue et se souhaite mutuellement bonne chance. Je le regarde s’éloigner puis me concentre de nouveau sur mon pace. Mollo, mollo, que je me dis.
Au 5e kilomètre, une apparition : le lapin de 4h15 (le chrono qui équivaut à un pace de 6 min/km) passe près de moi. Ce lapin, je décide de le suivre. Je suis absolument convaincue que si je demeure près de lui, tout se passera bien, il me mènera à bon port et je terminerai ce marathon sans souffrir!
Je joins alors le groupe de coureurs, moins d’une dizaine, qui suivent ses pas.
Au points d’eau, notre lapin ralentit et marche quelques instants afin de nous permettre de boire puis, tel une maman poule, il appelle ses poussins et repart tranquillement après s’être assuré que nous sommes tous là.
Au 21e kilomètre, j’aperçois mon patron devant moi. Je l’ai rattrappé. Je réalise alors qu’il a fait la même erreur que moi durant mes entraînements, il est parti trop rapidement.
Au 32e km, Valérie, une de mes copines, m’attend pour m’encourager. Parce que j’étais convaincue que ce serait un moment difficile à passer, elle m’avait promis d’être là et elle y est. Quand je l’aperçois, je me mets à crier son nom et les larmes remplissent nos yeux. C’est un moment extrêmement émotif pour moi, comme pour elle. Je vais bien et je sais, maintenant, que je peux compléter ce marathon!
Au 36e kilomètre, je croise mon conjoint pour la troisième fois. Parce qu’il me connaît et que je suis « excessive », comme il dit souvent, mon amoureux sait pertinemment que je n’arrêterai pas, même si c’est ce que nous avions convenu. Il me sourit et emboîte le pas pour m’accompagner jusqu’au fil d’arrivée.
Deux kilomètres avant la fin, confiante dans l’énergie qu’il me reste, j’augmente la cadence et distance mon lapin.
C’est l’euphorie lorsque je traverse le fil mais je n’ai qu’une seule chose en tête, retrouver mon lapin. Je ne le connais pas, nous n’avons échangé que 2 ou 3 mots, mais je tiens absolument à le remercier. Lorsque je le trouve, ma gorge se noue et je bafouille « merci, merci, merci… » alors il me prend dans ses bras.
Ce sera le premier d’une série de lapins qui influenceront ma progression et l’atteinte de mes objectifs.
Merci, Roger Larivière, mon « Roger Rabbit ».
Personne ne m’avait jamais expliqué ce que c’était que de l’endurance fondamentale, du tempo, des intervalles… Durant mes entraînements, j’avais deux vitesses : ma vitesse de départ et celle de mon arrivée… beaucoup, beaucoup plus lente. Je frappais le mur à chacun de mes entraînements car je les entamais comme si j’allais courir un 10 kilomètres. Je courais donc trop rapidement à chaque fois. Et je ne comprenais pas pourquoi c’était si souffrant de s’entraîner. Et comme c’était souffrant, je me disais parfois que mieux valait courir à un bon rythme pour que ça dure moins longtemps! Je me tirais dans le pied à chaque fois.
Mon premier 28 km avait été très pénible. Lorsque j’ai entrepris mon 32 km, ce fut bien pire. C’était un vendredi. J’avais congé. Mon itinéraire partait de ma résidence située à St-Basile-le-Grand et m’amenait 24 km plus loin sur l’île Notre-Dame. De là, je complétais les kilomètres manquants avant de terminer mon trajet à Radio-Canada ou m’attendait mon conjoint.
Ce fut atroce. Extrêmement pénible. Je me sentais comme une condamnée. J’avais une sentence à purgée. Et malheureusement, j’avais mal calculé mon itinéraire. Lorsque mon ordinateur de course a finalement affiché le chiffre magique m’indiquant que mon enfer était terminé, 3 autres kilomètres me séparaient encore de mon conjoint. Absolument incapable psychologiquement de continuer, complètement exténuée, je décide alors de me chercher un taxi. Pas évident de m’en trouver un… je n’ai pas de cellulaire et il n’y a pas de téléphone public dans les environs. J’entreprends alors de marcher péniblement vers le métro. Comble de malheur, je n’ai aucune idée de l’endroit ou se trouve ce foutu métro. Je croise alors un homme à qui je demande mon chemin. Sa réponse lorsqu’il constate mon état : « Madame, voulez-vous que j’appelle une ambulance »!
Selon mon programme d’entraînement, je devais théoriquement courir 36 km le week-end d’ensuite. J’étais complètement découragée. Je ne me voyais absolument pas répéter cette pénible expérience. Pour m’aider à traverser cette épreuve, j’ai alors songé à une solution : m’inscrire au marathon de Montréal qui avait justement lieu ce week-end-là. Je pourrais retirer plusieurs avantages de l’événement. Tout d’abord, j'aurais droit à l’ambiance de la foule et à la compagnie d’autres coureurs, très précieux comme motivation. Je n’aurais pas à trimballer de l’eau pour m’hydrater, le parcours serait bien balisé et s’il m’arrivait un pépin, il y aurait des secours. Il faudrait par contre que je me retire au 36e km…
Je contacte par téléphone le coach du club de triathlon dont je suis membre pour lui demander conseil. Après notre conversation, je raccroche le téléphone complètement démolie. « Tu n’as pas la maturité physique et psychologique pour courir un marathon », me dit-il alors que je m’entraîne depuis des mois.
Cette phrase restera ancrée en moi très profondément et me fera réfléchir énormément. Après avoir analysé froidement ma façon de m’entraîner, je décide finalement de m’inscrire au marathon de Montréal et de courir, cette fois, à une vitesse constante, une vitesse très confortable, que je pense pouvoir maintenir jusqu’à la fin. Mon objectif, maintenir un pace de 6 minutes du kilomètre.
Le matin du marathon, je suis extrêmement nerveuse. Heureusement, je sais que mon conjoint et des amis se trouvent le long du parcours pour m’encourager. Dès le coup de départ, je surveille attentivement ma vitesse pour m’assurer que je ne coure pas trop vite. Durant le premier kilomètre, mon patron – que je ne savais pas marathonien - me dépasse. On se salue et se souhaite mutuellement bonne chance. Je le regarde s’éloigner puis me concentre de nouveau sur mon pace. Mollo, mollo, que je me dis.
Au 5e kilomètre, une apparition : le lapin de 4h15 (le chrono qui équivaut à un pace de 6 min/km) passe près de moi. Ce lapin, je décide de le suivre. Je suis absolument convaincue que si je demeure près de lui, tout se passera bien, il me mènera à bon port et je terminerai ce marathon sans souffrir!
Je joins alors le groupe de coureurs, moins d’une dizaine, qui suivent ses pas.
Au points d’eau, notre lapin ralentit et marche quelques instants afin de nous permettre de boire puis, tel une maman poule, il appelle ses poussins et repart tranquillement après s’être assuré que nous sommes tous là.
Au 21e kilomètre, j’aperçois mon patron devant moi. Je l’ai rattrappé. Je réalise alors qu’il a fait la même erreur que moi durant mes entraînements, il est parti trop rapidement.
Au 32e km, Valérie, une de mes copines, m’attend pour m’encourager. Parce que j’étais convaincue que ce serait un moment difficile à passer, elle m’avait promis d’être là et elle y est. Quand je l’aperçois, je me mets à crier son nom et les larmes remplissent nos yeux. C’est un moment extrêmement émotif pour moi, comme pour elle. Je vais bien et je sais, maintenant, que je peux compléter ce marathon!
Au 36e kilomètre, je croise mon conjoint pour la troisième fois. Parce qu’il me connaît et que je suis « excessive », comme il dit souvent, mon amoureux sait pertinemment que je n’arrêterai pas, même si c’est ce que nous avions convenu. Il me sourit et emboîte le pas pour m’accompagner jusqu’au fil d’arrivée.
Deux kilomètres avant la fin, confiante dans l’énergie qu’il me reste, j’augmente la cadence et distance mon lapin.
C’est l’euphorie lorsque je traverse le fil mais je n’ai qu’une seule chose en tête, retrouver mon lapin. Je ne le connais pas, nous n’avons échangé que 2 ou 3 mots, mais je tiens absolument à le remercier. Lorsque je le trouve, ma gorge se noue et je bafouille « merci, merci, merci… » alors il me prend dans ses bras.
Ce sera le premier d’une série de lapins qui influenceront ma progression et l’atteinte de mes objectifs.
Merci, Roger Larivière, mon « Roger Rabbit ».