Iron Roman - Le récit de mon Ironman

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lundi 13 octobre 2008

Le gros Roger

Allongée sur le tapis du salon depuis une dizaine de minutes, son mari, le gros Roger, la regarda accoté sur le cadre de la porte. Avec son bouchon de bière, il se gratta le dessous du bras, comme il le faisait toujours, et rota profondément et aussi bruyamment qu’il le put. Ça le fit sourire, évidemment, car il savait pertinemment qu’elle le trouvait dégoûtant quand il faisait ça.

Elle ne bougea pas.

Étendue sur le dos, le teint pâle, elle le faisait exprès, encore une fois, pour le faire enrager. Ça, il en était convaincu. Début trentaine, sa chevelure parsemée de fils blancs formait une drôle de touffe autour de son crâne. Comme une poupée bas de gamme qu’une enfant aurait mal peignée. Ses yeux à demi-fermés s’emblaient disparaître au milieu de ses cernes. Son bras droit replié s’appuyait sur son front, sa main gauche, elle, reposait sur son sein.

Pas de seins, elle n’a même pas seins, se dit-il. Pas de seins, pis pas belle… « Pis conne en plus de ça », lui cria-t-il soudain en lançant d’un coup sec rageur son bouchon de bière vers ce petit paquet qu'elle formait à ses pieds.

Il rota de nouveau mais sans conviction cette fois et comme sa bière était terminée, il se dirigea vers le frigo pour s’en chercher une autre. La chaleur de juillet le faisait transpirer à grosses gouttes et son odeur « d’homme viril », comme il disait souvent, le suivit jusque dans la cuisine.

Par terre avec son contenu éparpillé, la sacoche pour laquelle ils s’étaient engueulés. Il se pencha, ramassa un ridicule porte-monnaie vert et rose et prit l’argent qui s’y trouvait. Il repassa près de l’embouchure du salon, s’arrêta, sorti les clés de l’auto du fond de sa poche, se grattant l’entrejambe en lui jetant un dernier coup d’oeil et s’en alla.

Lorsqu’il revint quelques jours plus tard, aux petites heures du matin et complètement saoul, il fut incapable de monter l’escalier. Il cria le nom sa femme pour qu’elle vienne l’aider. Mais il eut beau gueuler et gueuler, il ne la vit pas apparaître à la porte.

Bien qu’enragé, il dût se résigner à monter les marches seul.

Lorsqu’il parvint finalement à débarrer la porte, il donna un grand coup pour l’ouvrir. Déséquilibré, il tomba mollement par terre dans le portique.

L’odeur de la mort et le silence brisé par la nuée de mouches qui tourbillonnaient le firent vomir.

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