Le 25 septembre 2016
J’étais très nerveuse la veille
du marathon car avec une température annoncée tournant autour de 5 degrés au
départ, je ne savais pas trop comment m’habiller. Chandail long ? Camisole ? Harm-warmers ou non ? Bas
de compression ? J’étais très indécise car coquette et superstitieuse, je
voulais porter ma camisole rose ! N’avais-je pas remporté une médaille en avec
elle ?
Le matin de la course, j’ai donc
enfilé ma fameuse camisole, mes bas de compressions et un chandail pour me
tenir chaud avant le départ et que je projetais abandonner sur le trajet. Je me
suis préparé un sac de vêtements chauds pour me changer après la course et que
je déposerais à la consigne. J’en ai profité pour glisser à l’intérieur une
couverture thermique. Je projetais la mettre sur mes épaules avant la course
pour me protéger du vent et me garder au chaud. Mais petit hic, trop nerveuse,
j’ai oublié de la prendre avant de remettre mon sac ! Changement de dernière
minute, je troque les bas de
compressions pour des petits bas courts auxquels mes orteils sont plus habitués. Je ne veux pas prendre de
chance, mieux vaut porter des vêtements que j’ai déjà enfilés lors de mes longs
entraînements.
Je me dépêche car j’ai peur d’arriver
en retard pour la photo de groupe de mon club de course prévue à 7h40. Je
rejoins donc mes amis coureurs et on m’offre gentiment un imperméable en
plastique pour me protéger du vent. Que je suis contente ! Je me déplace
ensuite vers mon corral.
Aujourd’hui, je suis bien
déterminée à atteindre 2 objectifs : courir mon marathon en
3 :30 :00 et gagner la médaille de bronze dans mon groupe d’âge. J’ai
vérifié les chronos de l’an dernier et je pense que j’ai une chance. Je vais la
tenter !
Arrivée dans mon corral, le
numéro 3, je rencontre ma copine Roxane avec qui j’ai couru à Ottawa. Elle m’invite
à tenter 3 :25 :00 avec elle. Sa
compagnie me ferait plaisir, mais je préfère m’en tenir à mon plan initial. On
se quitte donc alors qu’elle s’éloigne dans le corral numéro 2.
Je trouve ensuite facilement mon
lapin. Il s’appelle Denis et me semble bien s sympathique. Il nous explique sa
stratégie. Courir la première moitié plus rapidement afin de mettre du temps en
banque pour les faux plats traîtres de la deuxième moitié. Il semble bien connaître
le parcours. Ça me met en confiance.
Quelques minutes avant le départ,
j’abandonne mon imperméable de plastique
puis décide de retirer également mon chandail. Me voilà en camisole, exposée
aux vents, par 5 degrés. Je me mets rapidement à claquer des dents et à
trembler comme une feuille.
Enfin, c’est le départ. Je pense
à mon frère René qui se bat contre la dépression et je décide de courir pour
lui. À chaque fois que je verrai une pancarte indiquant un kilomètre, je
penserai à lui.
Les deux premiers kilomètres
demandent beaucoup de concentration. Il y a tellement de coureurs que j’ai peur
de m’enfarger dans les pieds des autres ou de perdre mon lapin de vue. Du
calme, tout va bien !
Ensuite, les kilomètres
s’enfilent rapidement. Je refuse d’évaluer comment je me sens. Je préfère me
distraire en écoutant ma musique et le bruit des pas autour de moi. J’apprécie
les encouragements de notre lapin (il semble y avoir un gros groupe qui le
suit) et je l’écoute quand il nous donne des conseils.
Au 7e kilomètre, il y
a un point d’eau et un de mes collègues s’y trouve avec sa fille en tant que
bénévole. Je le cherche des yeux mais dans le brouhaha, je n’arrive pas à le
localiser.
Au 10e kilomètre, nous avons engrangé 1 min 10 d’avance sur
notre temps de passage. Mon ischion gauche fait des siennes. Je le sens raide
mais ma foulée demeure bonne et mon rythme également. Alors je refuse de
m’inquiéter.
En arrivant dans le Vieux Port,
je sais que les côtes s’en viennent. Rien de dramatique à mon avis, même
concernant la côte Berry. J’ai vu pire cet été ! Le moral est bon, tout va bien
et il y a de l’ambiance autour de nous. On approche ensuite du Parc Lafontaine
et on sent une différence lorsque les demi-marathoniens quittent le parcours
pour se diriger vers leur fil d’arrivée. On a plus de place pour courir !
Au 21e km, nous avons
1 min 20 d’avance. Et comme dit un coureur : « C’est maintenant que
le marathon commence ». Tranquillement, je me place devant mon lapin mais
je le surveille dans mon angle mort.
Au 28e km, l’énergie
descend mais je refuse d’y accorder de l’attention. Mon troisième gel fait
bientôt effet et au 30e km, j’ai comme un deuxième souffle. On
dirait que ça va mieux. Good. Tranquillement, je distance mon lapin. Il a
probablement commencé à ralentir. Moi aussi. Au 32e km, mon avance
est descendue à 30 secondes. Je dois maintenir le cap. Il ne me reste que 10
km. Une cinquantaine de minutes de plus et je franchirai le fil d’arrivée.
Je me mets à me poser des
questions. Pourquoi je cours un marathon ? C’est souffrant !
De plus en plus, je dépasse des
marathoniens qui marchent ou qui sont arrêtés, pliés en deux. Le flot de
coureurs s’est étiré. J’ai de l’espace autour de moi pour courir, mais je me sens
un peu plus seule aussi. Tout à coup, j’entends mon nom. Ma collègue Laëtitia
est sur le bord de la rue et m’encourage. Je dévie mon trajet pour aller lui
taper dans la main. Ça fait du bien. Elle me dit qu’elle sera là lorsque je
repasserai. Je ne suis plus seule ! Et comme promis, elle est là lorsque je
repasse plusieurs kilomètres plus tard.
Mon énergie descend. Au 40e
km, je fais des calculs dans ma tête. Ma vitesse tourne autour de 5 min 15 /
km. Mon chrono indique près de 3 :20 :00. Hummm… Vais-je atteindre
mes objectifs ? Le lapin de 3 :30 :00 va-t-il me rattraper ou pire,
me dépasser ?
Heureusement, plus je m’approche
du fil d’arrivée, plus il y a de l’ambiance. Au dernier tournant, je stimule la
foule en appelant leurs encouragements.
Je pense à mon frère une dernièrre fois. Puis enfin, c’est la fin.
3 :30 :35.
Est-ce la fatigue ou la joie
d’avoir complété mon 8e marathon ? Je ne sais pas, mais j’ai un
petit sanglot lorsqu’un jeune bénévole me passe ma médaille de finisher dans le
cou !
Quelques pas après avoir franchi
le fil d’arrivée, on me tape sur l’épaule. C’est mon cousin Simon qui m’a
reconnue dans la foule. Il a franchi le fil d’arrivée 15 secondes avant moi!
Quelques instants plus tard,
j’aperçois mon lapin. Je ne peux m’empêcher d’aller le remercier
chaleureusement et de le prendre dans mes bras. Merci ! Merci Denis !
Je me rends ensuite vers la tente
où sont distribués les manteaux de l’événement donnés à chaque marathonien qui
a complété l’épreuve puis je me dirige vers les autobus chercher mon sac de
vêtements chauds.
Puis enfin, je prends le temps de
regarder les résultats.
Fébrile.
Médaille de bronze dans mon
groupe d’âge !